De ma fenêtre

De ma fenêtre
Toulouse, 5 juillet 2014, 21h15

samedi 1 août 2015

le matin parfois est si vieux


Le matin parfois est si vieux qu'il ment,
ce ciel, ces nuages, ces oiseaux,
les montagnes invisibles, les maisons,
briques entrelardées de pierres blanches,
l'épaisseur du temps se lit dans chaque détail,
la branche du figuier contient toutes celles
qui l'an dernier frissonnaient au moindre souffle,
les larmes venaient aux yeux, tant de fraîcheur,
vite séchées par une lumière d'or,
mais ce matin, la perspective creuse
l'arrière-salle des êtres, des choses,
dans la cuisine on s'affaire à concocter
je ne sais quoi, tout manque, on bricole
avec des riens, chutes abandonnées à terre,
épluchures d'un amour à peine cueilli,
feuilles d'arbres abattus par mégarde,
alors s'invite un homme sans âge,
les yeux rongés par le chagrin,
de n'avoir su tenir quand vents et marées
s'en prenaient aux racines de l'esprit,
aux exigences du corps,
laissant à l'air, pâles et fragiles,
des blessures de l'histoire,
des éclats de batailles obscures,
des mélodies nocturnes,
des fresques à la gloire des premières fois,
tu sais bien, mots lancés en l'air, puis à l'eau,
engloutis jusqu'à la thermocline,
n'avait-il rien vu venir,
il parcourait l'univers sans effort,
mais ce visage, ces lèvres offertes,
ces doigts caressant son bras,
là se tenait le secret de tout,
dans le frémissement des fleurs,
la légèreté d'une libellule au soleil,
ainsi vont les pensées matinales,
diluées dans l'odeur du café,
la confiture de myrtilles n'arrive pas
à faire surgir les pentes escarpées,
les chevaux noirs déboulés de la crête
pour renifler les intrus,
le matin accourt parfois comme eux,
et se pose sur le palimpseste de nos mains.

(1er août 2015)
Lyon, Palais Saint-Pierre, Démocrite, L.-A. Delhomme, 1868.
©JJMarimbert


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